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Marie-Anne Lorgé

Gare art festival version «CaseMates»

Chaque été, un symposium de sculptures a pris l’habitude d’installer son vaste atelier à ciel ouvert dans le quartier Gare de Luxembourg – initié pour la cause par l’a.s.b.l. Groupe Animation Gare et piloté depuis dix-huit ans par Florence Hoffmann. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le rendez-vous est attendu. Pour les sculpteurs nationaux et internationaux invités, c’est ainsi l’opportunité (le challenge aussi) de créer en direct une semaine durant, partant d’un matériau différent tous les deux ans (sable, pierre, bois, métal, béton, argile); pour le public, passants et curieux peu ou prou avertis, c’est ainsi l’idéale occasion de se frotter au plus près au processus de création, à cela qui généralement s’ouvrage secrètement dans les ateliers d’artistes.



ça se passe comme ça depuis 20 ans. Et cette année, édition anniversaire oblige, le programme promettait d’être ambitieux, incluant une exposition rétrospective 2001-2020, un parcours d’une trentaine de sculptures à travers différents quartiers de la Ville, ainsi, notamment, qu’un documentaire. Sauf que, voilà, la crise sanitaire Covid-19 a frappé, contraignant le report de la manifestation à 2021.


Pour autant, pas question de souscrire au repli. Un plan B a donc germé, répondant à l’urgence de soutenir les arts et les artistes en leur offrant une visibilité. Un plan B nommé «CaseMates», mot qui tout en faisant écho aux casemates si typiques de la ville de Luxembourg, mixe deux références et sens, dont le compagnon (mate en anglais) et la maison (la case), ce lieu exacerbé par le confinement, là où les choses se fabriquent ou d’où on observe… le bon comme le moins bon.

Et donc, «CaseMates» comprend deux volets. Le premier volet consiste en une expo en ligne de photos de 24 sculptures monumentales, sélectionnées en vertu de trois critères, dont précisément leur monumentalité et leur réalisation endéans les 3 ans. A partir du 24 août, une sculpture de cette collection – constituée par des créateurs.trices originaires d’Italie, d’Espagne, de Roumanie, d’Ukraine, du Danemark, Pérou, Lettonie, Slovaquie, Argentine, Cuba, France et Luxembourg – sera publiée chaque jour sur deux plateformes: les pages Facebook (www.facebook.com/gareartfestival) et Instagram (www.instagram.com/gareartfestival).


Quant au second volet, il est physique, à vivre concrètement dans la gare de Luxembourg. Là, où depuis le 7 août et jusqu’au 13 août inclus, chaque jour, pile à 11.00h, une œuvre est dévoilée, alors délivrée du drap rouge qui la dissimule jusqu’au jour J. C’est ainsi, tout au long d’un petit circuit à travers le hall, les guichets et la verrière de la gare, que sept oeuvres se déshabillent. Autant de créations hybrides, se réclamant plutôt, cette année, de l’installation, signées par sept artistes, six Luxembourgeois et un Belge, en l’occurrence: Jorg Van Daele.


Jorg Van Daele propose une lecture des énergies complémentaires de l’être et du cosmos que sont le yin et le yang en combinant l’acier inoxydable et la pierre bleue, l’alliage industriel et le matériau naturel, le géométrique et l’organique. En fait, intitulée It's a long way to find peace of mind, l’œuvre est un séduisant exercice d’équilibre ou de contrepoids, la pierre, taillée en formes ovoïdes ou en prismes, étant disposée comme un corps à l’intérieur de la très graphique architecture métallique.


Samedi, le 8 août, c’est «rencontre dans l’isoloir», avec Florence Hoffmann qui grâce à un ersatz de cabine en résine saupoudrée de sable, conçoit un jeu de cache-cache gigogne, où il est question de regard – voir sans être vu - et de corps – tout à la fois dissimulé et exhibé.


Il y a du Molière dans l’air, en tout cas, de la tartuferie, dont Florence se joue, étalant ce sein que l’on ne saurait voir… alors qu’on ne désire que ça. Du reste, Molière disait «sein» pour «sexe» et donc, pour transposer la métonymie, c’est tout un nu féminin – un corps au demeurant parfait, celui du buste déco des magasins – que Florence a moulé sur deux faces de la cabine, cet espace privé, enclos de la soustraction du regard, du coup promu agent de liaisons dangereuses, ouvert à un florilège de transgressions et d’inversions, perméable aussi à ces problèmes désormais de société que sont le genre et le harcèlement, sans compter cette vieille affaire jamais apaisée qu’est la nudité.


Voilà comment, partant d’une simple cabine, trois panneaux et une empreinte, avec le vocabulaire idoine «vide/creux, intérieur/ extérieur», Florence réussit à dynamiter nos jugements et préjugés, à surfer sur notre humaine dualité faite de transparence et de mensonge. Et le tout, du bout d’une ironie douce.


Dimanche, même registre féminin/féministe, avec Anne Lindner qui suspend des oeufs d’or à une échelle, une installation née d’un «jeu de mot en allemand évoquant les trompes de Fallope». Hier, lundi 10 août, c’était le jour du bois, Nadine Zangarini faisant naître une figure d’un tronc d’arbre par le geste, la gouge et le maillet.


Aujourd’hui, mardi, c’est à vous de voir – sachant, en tout cas, qu’à 11.00h, c’est Lis Prussen qui vous attend. Et donc, dans le jeu de piste, jusqu’au 13/08, il s'agira encore de démasquer deux créations, celles de Miriam R. Krüger et de Richard Mignot.

Ces sept sculptures et installations restent visibles dans la gare jusqu’au jeudi 25 septembre inclus.

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